Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Le blog des privés d'emploi  cgt ales

contenu syndical et politique, chômeurs rebelles Alès

Rentrée Solennelle 2015 du CPH d'Alès

Publié le 3 Février 2015 par Privés d'emploi Alès

(Photo IJ La Marseillaise)

(Photo IJ La Marseillaise)

Monsieur Le Premier Président,

Monsieur Le Procureur Général,

Madame La Présidente du TGI,

Monsieur le Procureur de la République,

Monsieur le Sous-préfet de l’arrondissement d’Alès,

Madame le Bâtonnier,

Mesdames et Messieurs les députés,

Mesdames et Messieurs les élus,

Mesdames et Messieurs les fonctionnaires de l’administration judiciaire,

Mesdames et Messieurs,

Je vous souhaite la bienvenue à cette audience solennelle du conseil de prud’hommes d’Alès et je vous sais gré du témoignage d’intérêt que représente votre présence ici ce jour.

Madame La Présidente du Tribunal de Grande Instance, je profite de cette occasion pour vous présenter les vœux de bienvenue à Alès de l’ensemble des conseillers prud’hommes d’Alès.

Monsieur Le Procureur de La République, je profite de cette occasion pour vous renouveler nos vœux de bienvenue à Alès et une pleine réussite dans l’exercice de votre fonction si difficile.

Monsieur le procureur de la République avez-vous des réquisitions à formuler?

Monsieur le procureur je vous donne acte de vos réquisitions et dit que du tout il sera dressé procès-verbal.

Mesdames et Messieurs,

L’agitation réformiste du pouvoir exécutif et législatif vise à nouveau la prud’homie : au détour d’une loi sur l’économie, nous voici donc au centre des préoccupations du ministre de l’Économie… Nous serions donc un frein, un verrou, une barrière à la sacro-sainte « libération des énergies ».

Bien. On nous reproche,- « on » étant parfois bien incapable d’argumenter sa pensée autrement que par des ukases- notre lenteur à rendre des décisions, notre déontologie défaillante ou encore la fragilité voire l’instabilité de nos raisonnements juridiques.

Je voudrais vous apportez quelques éléments, particulièrement à vous, Messieurs les Députés, pour sinon vous convaincre au moins vous confirmer que vos arguments sont spécieux : - lenteur à rendre des décisions : «Un jugement trop prompt est souvent sans justice » avons-nous appris avec Voltaire vous rétorquerai-je avec humour…

Faire porter sur nos épaules les conséquences de choix organisationnels et budgétaires qui nous échappent pleinement est totalement déloyal : décret de 2008 et 2009 sur l’encadrement de nos activités, limitation des heures d’administration accordées aux présidences et vice-présidences de Conseil, suppression de 61 Conseils, limitation drastique des remplacements de fonctionnaires de justice. Comment voulez-vous faire fonctionner efficacement une juridiction en l’amputant régulièrement, presque insidieusement, d’une partie de ses moyens ? Peut-être vous a t-il échappé que le Tribunal de Grande Instance de Paris saisi à 71 reprises a jugé l’État responsable du manque de moyens des juridictions prud’homales dans des termes extrêmement durs, je cite : « (…) Si manifestement ces délais excessifs résultent d’un manque de moyens de la juridiction prud’homale, il n’est pas discutable qu’il revient à l’État de mettre en œuvre les moyens propres à assurer le service de la justice dans des délais raisonnables(…) ».

Le mal est ainsi nommé : le manque de moyens… Vous souvenez vous qu’à l’occasion de la réforme de la carte judiciaire, ce sont plus de 60 Conseils de prud’hommes qui ont été supprimés ? Croyez-vous un instant que ces choix n’impactent pas directement les délais de traitement des dossiers ?

Mesdames, Messieurs,

Le législateur envisage afin de réduire ces délais de transférer une partie du contentieux directement devant un juge de départage… Soyons sérieux : à Bobigny le délai d’audience de départage est de 30 mois, à Marseille il est de 18 mois, à Alès il de 4 mois : quelqu’un croit-il sérieusement à l’idée que le transfert d’une partie du contentieux aux magistrats professionnels nous fera gagner du temps ?

C’est Victor Hugo qui disait plaisamment qu’une grande nation se reconnait aux moyens consentis-en matière d’Éducation et de Justice : Messieurs les députés, ne faites-pas de notre pays une petite Nation.

Mesdames et Messieurs, il faudra quand même un jour considéré que les fonctions régaliennes de l’État ne sont pas un coût mais une valeur, à tous les sens du terme. Je voudrais aussi vous dire mon agacement de l’irruption permanente de techniques de benchmarking afin de comparer la performance des juridictions... Sommes-nous si comparables à des barils de lessives qu’il faille nous appliquer les mêmes outils d’analyse comparative ?

- une déontologie défaillante : une nouvelle fois, et pour ma part c’est une véritable blessure tant je suis attaché au serment prêté au visa de l’article D-1442-13 du code du travail : « (…) « Je jure de remplir mes devoirs avec zèle et intégrité et de garder le secret des délibérations »- nous avons entendu un Ministre dire la nécessité de renforcer notre déontologie. J’avoue n’avoir pas bien compris cette intervention. J’avoue aussi ma lassitude : le soupçon permanent sur l’intégrité morale des conseillers est une offense faite à l’entière autorité judiciaire. Pourtant, la Cour de Cassation avait trouvé les mots justes et les arguments juridiques exacts pour écarter ce risque de soupçon :

« (…) L’exigence d’impartialité, imposé tant par les règles de droit interne que par l’article 6-1 de la Convention Européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, est assuré, en matière prud’homale, par la composition même des conseils qui comprennent un nombre égal de salariés et d’employeurs élus, par la prohibition d’ordre public de tout mandat impératif par la faculté de recourir à un juge départiteur extérieur aux membres élus et par la possibilité, selon les cas, d’interjeter appel ou de former un pourvoi en cassation(…) »,

Qu’il me soit permis ici à ce moment, de remercier chacun des conseillers pour son engagement bénévole au service de la juridiction et au bénéfice de l’État : que ce soit les conseillers issus du collège salariés qui doivent bien souvent trouver les moyens d’organiser leur absence dans les ateliers, dans les bureaux, dans les services, voyant se rajouter à la charge de travail professionnelle la charge de conseillers, ou que ce soit les conseillers issus du collège employeurs qui dans un contexte économique dramatique ont fait le choix de continuer leur engagement au service de la juridiction quand le choix de raison eut été de concentrer leur énergie et leur disponibilité sur leur seule entreprise.

Messieurs les députés, est-ce cet équilibre qui vous gêne ?

Est-ce cette originalité juridictionnelle qui vous pose problème ?

Savez-vous qu’elle sert nos concitoyens depuis 1806 ?

Savez-vous que depuis le 07 février 1880 les Présidents et Vice-présidents sont élus par leurs pairs ?

Savez-vous que depuis les lois du 15 juillet 1905 et du 25 mars 1907 les présidences alternent obligatoirement ?

Savez-vous que les premières élections ouvertes aux femmes ont été les élections prud’homales dès 1907 ?

Savez-vous que la suspension des élections n’a eu lieu que durant l’Occupation ?

Avez-vous compris que nous étions le produit d’une histoire sociale, riche, tourmentée mais qui est le terreau d’un dialogue social constructif ?

Nous ne défendons pas une prud’homie paritaire et élective pour défendre une exception culturelle mais bien parce qu’elle a fait ses preuves en matière de dialogue social, de droit social et d’apaisement de la conflictualité entre travailleurs et entrepreneurs. A cet égard, il me faut souligner l’apport important que pourra être le développement de la formation des Conseillers. Formation oui, formatage, non.

Mesdames et Messieurs les représentants du pouvoir législatif, je n’ose croire que vous vouliez nous renvoyer à la loi du 21 Germinal an IX…

- Instabilité juridique et une fragilité dans nos raisonnements juridiques : j’avoue là-aussi ne pas comprendre la recherche du législateur. Est-ce une remise en cause du principe d’individualisation du jugement ?

Est-ce le retour à une conception arbitrale de la justice du travail ?

Qu’est-ce que l’instabilité juridique ? Le fait que des décisions ne soient pas connues d’avance ? Que l’impérium du juge reste force d’émergence de la vérité judiciaire ? Qu’est-ce que la fragilité de nos raisonnements juridiques ? Le fait d’un taux d’appel important, peut-être excessif ? La spécificité de la justice prud’homale, cette justice de la vie quotidienne au travail, cette justice de la créance alimentaire qu’est le salaire est par nature une justice où les voies d’appel seront épuisées jusqu’au bout. Permettez-moi de dire que c’est un principe consacré par la République.

Il m’appartient maintenant conformément aux obligations posées par le code de l’organisation judiciaire, de vous faire le bilan de l’activité de la juridiction pour l’année judiciaire 2014.

Cette année judiciaire fut marquée par notre déménagement des locaux fonctionnels du quai Boissier de Sauvages. Mon désaccord reste entier sur cette décision de délocalisation pour des prétextes futiles et déraisonnables. Il m’appartient néanmoins en tant que Président de veiller au bon fonctionnement de la juridiction au bénéfice des justiciables : c’est dans cet état d’esprit que j’ai œuvré toute l’année 2014. Je tiens à remercier l’ensemble des personnels du TGI et du TI pour leur accueil.

Je voudrais remercier Éric Bramat pour sa courtoisie, sa compréhension de nos problématiques spécifiques et sa volonté de faire que le Conseil soit pleinement opérationnel dès son arrivée dans les locaux. J’associe Thierry Lescouar’ch à ces remerciements. Quelques furent nos divergences d’appréciation, nous avons travaillé de manière pragmatique et dans le respect des juridictions que nous représentions.

Au 31 décembre 2014, 480 affaires sont en cours devant le Conseil de Prud’hommes :

- 4 devant la section agriculture,

- 170 devant la section commerce,

- 46 devant la section activités diverses,

- 39 devant la section encadrement,

- 192 devant la section industrie,

- 29 devant la formation des référés.

501 affaires ont été terminées durant l’année écoulée : 363 ont entraîné une décision au fond.

Avec 38 radiations, la juridiction a été contrainte de rappelé aux parties et à leurs avocats que la diligence des parties était nécessaire afin que les décisions soient rendues dans des délais raisonnables.

Avec 14 jugements de départages contre 17 en 2013, 24 en 2012, 24 en 2011 et 66 en 2010, les conseillers ont pleinement fait du départage ce qu’il doit être : une procédure exceptionnelle et ultime. Ils ont aussi fait la démonstration que le paritarisme n’était pas un frein à la production des jugements. Si le taux national de départage avoisine les 18%, à Alès il est de 3%. Il convient à nouveau d’en féliciter les conseillers.

Avec un taux d’évacuation moyen de 10.4 mois toutes affaires et toutes sections confondues, peut-être avons-nous trouvé la solution pour résoudre la question des délais : des conseils à taille humaine… et non les usines à gaz voulues par les tenants de l’industrialisation de la justice…

Ce taux moyen fluctue en fonction des sections : entre 8.3 mois pour la section agriculture et 15.9 mois pour la section encadrement dont la complexité des affaires appelées devant elle nécessite un délai de délibéré souvient supérieur au délai de délibéré des autres sections. Je vous précise que sur cette durée du délibéré oscille entre 1.9 mois et 3.9 mois. Sommes-nous si lent que cela à délibérer ? Concernant la formation si particulière des référés, ce sont 147 affaires qui ont été terminées dans un délai de 1.5 mois. 29 affaires enrôlées restent en cours, l’âge moyen du stock est de 1.9 mois. Une nouvelle fois de plus, peut-on nous taxer de lenteur ?

Toutes sections confondues, hors donc la formation des référés, l’âge moyen du stock est de 11.7 mois et la durée moyenne des affaires est de 14 mois.

Concernant les appels formés contre nos décisions, ils ont été de162 en 2014 : devrions-nous supprimer les voies d’appel pour améliorer les ratios ?

Voilà les éléments que je souhaitais porter à votre connaissance.

Madame la Greffière, voulez- vous s’il vous plaît donner lecture du procès-verbal de notre Assemblée Générale qui s’est tenue le 13 janvier 2015

Monsieur le Procureur de la République, souhaitez-vous être entendu en de nouvelles réquisitions ?

Mesdames et Messieurs, certains d’entrevous viennent d’être honorés par l’obtention du diplôme d’honneur du Ministère du Travail.

Je cite donc : Mme Florence Marino, Monsieur Pierre Pic, Monsieur Thierry Torrès, Monsieur Michel Paris et moi-même.

Mesdames et Messieurs, au moment de vous présenter mes vœux, j’ai une pensée pour toutes les victimes des drames qui ont touché notre Nation en ce début de mois.

Je forme des vœux de réussite économique pour ce bassin d’emploi, je forme des vœux de réussite sociale pour ce bassin d’emploi. Je souhaite que la conversion de notre économie industrielle vers une économie du futur permette à chacun de trouver sa place, que les efforts de tous améliorent la condition de chacun.

Mesdames et Messieurs, avant de déclarer close l’année judiciaire 2014 et remettre la médaille de Président du Conseil à Jean-François Corbière, -dont l’engagement et la disponibilité quasi quotidienne ont grandement facilité nos travaux commun-, issu du collège employeur, je tiens à adresser mes remerciements les plus chaleureux au personnel du conseil de prud’hommes : Hélène Arbus, Claudine Medjir, Chantal Carion et Marie-Claude Pauthonnier. Elles sont l’incarnation du service public de la justice.

Je déclare close l’année judiciaire 2014 et je vous remets, Monsieur Corbière, la Présidence du Conseil.

William Malavelle

Commenter cet article